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Made in métropole – Les artisans costumiers du Grand Théâtre
Photo : Alban Gilbert
4 min de lecture

Made in métropole – Les artisans costumiers du Grand Théâtre

Ils se lèvent tôt, travaillent parfois 7 jours sur 7. Certains font un métier oublié ou méconnu et revendiquent le maintien d’un artisanat engagé, respectueux des traditions. Un Air de Bordeaux vous propose d’aller à la rencontre de ces artisans locaux, qui façonnent les pépites gastronomiques et artistiques de la région. Pour le deuxième volet de cette série, Un Air de Bordeaux s’est faufilé dans le dédale des étages de l’Opéra de Bordeaux pour pousser la porte de son atelier de costumes.

par Klervi le Cozic

publié le 02 janvier 2020

modifié le 04 février 2021

Un atelier laissé « dans son jus »

Difficile d'imaginer qu'au-dessus du lustre en cristaux de Bohème qui orne la coupole de la salle de spectacle du Grand-Théâtre, se trouve une pièce toute en rondeur. La charpente d'origine n'a rien à envier à la fresque de la coupole peinte par Jean-Baptiste Robin. Dans cette pièce, encore plus haute que le paradis, y foisonnent tissus, couleurs, bobines et idées.

C'est là qu'officient les costumiers de l'Opéra national de Bordeaux depuis 2011. « Auparavant c'était une salle de répétition pour les danseurs du ballet mais ils faisaient trembler le lustre lorsqu'ils sautaient ! Puis les chanteurs lyriques ont essayé de s'en servir mais impossible de passer un piano par les portes étroites, alors on s'y est installé » raconte Jean-Philippe Blanc, le chef de l'atelier depuis dix ans, ravi d'y avoir installé son atelier. « J'ai préféré laisser la pièce dans son jus avec la barre de danse, les miroirs et même le tapis. »

Photo : Klervi Le Cozic

Des costumes vivants

« Ici on raconte une histoire avec des vêtements. Notre métier ce n'est pas la couture, c'est avant tout de faire des vêtements qui sont expressifs », explique Jean-Philippe Blanc. Dans l'atmosphère feutrée de l'atelier, seules les machines à coudre et le fer à repasser se font entendre. Ici un tutu s'érige, là une broderie apparaît, ailleurs ce sont des combinaisons qui prennent vie. « À une simple combinaison noire, on peut lui faire dire plein de choses différentes ! », sourit le chef de l'atelier une paire de ciseau à la main.

Le costume commence par le choix du tissu. « On propose des matières différentes car un crêpe de soie ou un gros velours ne diront pas la même chose d'un personnage. » Ensuite ? « On s'adapte, on innove, on est tout le temps en train d'inventer la couture dont on a besoin en faisant des moulages, en s'inspirant du col de telle chemise et de la manche de telle autre. Dès ce moment on anticipe tous les besoins du vêtement : si c'est celui d'un choriste il faut qu'il ait de l'amplitude pour respirer, si c'est un danseur il faut qu'il suive son corps sans cacher ses mouvements, même les plus imperceptibles... »

Photo : Klervi Le Cozic

Le costume, source d'interprétation pour l'artiste

« Une fois que le créateur a validé le projet on fait soit juste une toile, c'est comme un brouillon du tissu ou bien on le réalise directement. Le premier essayage est un moment important car l'artiste découvre la silhouette que le metteur en scène a voulu donner à son personnage. Ça arrive que certains se trouvent trop vieux, ou trop patauds ou au contraire que ça leur ouvre des portes sur l'interprétation de leur personnage ! »

À l'occasion de cet essayage, le costumier questionne, guide. « On échange beaucoup pour trouver en quoi le costume pourra encore mieux aider l'artiste avec son personnage, par exemple un costume très lourd peut forcer une démarche à être plus lente, un corset donnera une silhouette et un port de tête inégalable... »

Photo : Klervi Le Cozic

Jean-Philippe Blanc, chef d'atelier passionné

« Je n'ai jamais pensé couture, lyonnais d'origine, mes parents travaillaient dans le tissu, c'était ma voie toute tracée ! », raconte Jean-Philippe Blanc qui a d'abord suivi un BT de vêtement, création et mesure. Dans ce cadre il part en stage... aux Folies-Bergères à Paris. « Je me suis pris une claque dont je ne me suis toujours pas remis ! C'était le délire, un vrai espace de liberté et de création ! »

Il se dirige alors vers l'ENSATT (l'Ecole nationale supérieure des arts et techniques du théâtre) section costumier-réalisateurs. Après plusieurs années dans le cinéma, ses pas l'ont mené vers l'Opéra. « J'ai un gros appétit culturel, je lis aussi beaucoup de livres sur le textile, la couture, les couturiers, la peinture, l'architecture. »

L'architecture ? « Oui car un costume c'est avant tout un volume. Mais on peut mettre tout et n'importe quoi comme références et inspirations dans un costume, même le super gâteau appétissant que vous avez mangé dimanche dernier ! »

Photo : Klervi Le Cozic

Un travail d'équipe

Notre métier est en collaboration avec plein d'autres corps de métier, on travaille avec l'atelier des accessoires, des décors mais aussi avec l'équipe d'habillage qui gère la vie du costume une fois achevé. C'est elle qui devra habiller le bon artiste avec le bon costume avant son entrée sur scène.

Photo : Klervi Le Cozic

La création, « un défi permanent »

« C'est aussi une grande fierté de voir le costume sur scène. » explique Claudine, à l'atelier costume depuis dix ans. « J'aime la diversité et la créativité que demande ce métier. On ne sait jamais si on va parvenir à faire ce qu'on nous a demandé mais finalement on y arrive toujours, c'est un défi permanent ! » Son meilleur souvenir ? « Les costumes de Casse-noisette, en plus j'adore faire les bustiers ! » « Pour choisir mes collaborateurs je ne choisis que des personnes qui se posent des questions. C'est à ce moment-là qu'ils font un bon travail de costume », ajoute le chef costumier.

Photo : Klervi Le Cozic

Un métier de passion

« On a la chance de faire un métier de passion qui nous amène à faire beaucoup d'efforts techniques, artistiques qui font que l'on se révèle chaque jour à nous-mêmes à tel point que, même si on ne fabrique jamais pour nous, on reçoit beaucoup. » chuchote Jean-Philippe Blanc pour ne pas troubler la concentration de l'atelier.

Photo : Klervi Le Cozic

Le recyclage permanent

« Les costumes d'une pièce sont gardés ensemble pendant 10 à 15 ans. Ils pourront resservir si la pièce est reprogrammée à Bordeaux ou partir dans d'autres opéras qui ont coproduit le spectacle ou qui le louent. » explique Jean-Philippe Blanc.

Il arrive aussi que les spectacles soient déprogrammés. « On peut alors récupérer les pièces du costume et garder les chemisiers, robes et imperméables qui serviront à créer les personnages d'un prochain spectacle, c'est un recyclage permanent ! On tient beaucoup à cet aspect culturel du costume, pas seulement pour faire des économies. À chaque fois que l'on ressort une pièce pour l'adapter à un nouvel artiste c'est comme si on retrouvait un membre de la famille ! C'est un plaisir de savoir qu'il peut avoir deux ou trois vies ».

Photo : Klervi Le Cozic

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