Catégories : Culture & patrimoine

La rive droite de Bordeaux hier et aujourd’hui

>Avec son passé industriel, la rive droite est une des parties qui a le plus changé à Bordeaux. Des bâtiments, des rues entières ont disparu et il est parfois difficile de reconnaître les lieux. Mais le progrès est aussi parfois un retour vers le passé, surtout lorsqu'il s'agit de profiter d'un riche patrimoine. (Cet article est le tome 3 de notre série "Bordeaux hier et aujourd'hui". Le tome 1 est consacré aux quais, le tome 2 s'intéresse aux places et le tome 4 retrace l'histoire des halles et marchés de Bordeaux).

PORT DE LORMONT

Lormont l'exotique

C'était un peu l'exotisme à une encablure de Bordeaux : « Je veux voir en détail cette admirable colline de Lormont, qui se compose de mamelons successifs, dont les crêtes sont couronnées de maisons de campagne et de grands arbres », écrit Stendhal en 1838 à propos de son voyage à Bordeaux.

À cette époque, la ville est tellement en vogue qu'un service de navettes y débute en 1865 au départ de Bordeaux : la compagnie des Hirondelles commence, suivie par celle des « Gondoles », puis celle des « Abeilles ». Fabriqués à Bordeaux, caractérisées par leur très haute cheminée, ces vapeurs seront supprimées en 1946. 

La rive droite de bordeaux, lormont, avant Photo : La Mémoire de Bordeaux Métropole

Le retour des balades

C'est un éternel recommencement. Longtemps relégué pour les centro-Bordelais à un presque infamant terme générique de « rive droite », Lormont a retrouvé un peu de sa superbe avec la mise en service des remplaçants des gondoles, les Bat3. Ceux-ci s'arrêtent à l'endroit même où les anciens bateaux faisaient halte.

Le parc de l'Ermitage réaménagé est redevenu un lieu de promenade, et la place où s'amarrent les nouvelles navettes fluviales reprend vie, même si le TGV a remplacé le train à vapeur. On redécouvre Lormont et un circuit de promenade permet d'en voir l'essentiel. 

Bordeaux rive droite à lormont Photo : Pierre Planchenault

GARE D'ORLÉANS

L'ancêtre des gares

C'est une des toutes premières gares à naître en France. Elle accueille les trains venant d'Angoulême dès sa création, en 1852, puis ceux de Paris l'année suivante. La ligne relie en un temps record la capitale à Bordeaux, en 13 heures et 7 minutes. Mais son destin, c'est la malchance : en 1861, la gare Saint-Jean naît. Plus proche du centre-ville de Bordeaux, elle fait de l’ombre à la gare d’Orléans qui voit son trafic se réduire, passant du national au local seulement, avec un peu de fret.

La belle verrière disparaît en 1950 (la légende dit qu'elle s'est effondrée, mais la SNCF avait auparavant retiré les caténaires dans la gare...) et la statue monumentale se volatilise (on ne l'a jamais retrouvée). Les derniers voyageurs y prennent le train en 1951 (sauf les soldats qui partent en Indochine) et le fret s'achève en 1990.

La gare d'orléans, rive droite de bordeaux avant Photo : La Mémoire de Bordeaux Métropole

Le réveil de la bastide

La suite fut tout aussi compliquée : alors que l'on promettait un « grand projet culturel », le bâtiment est pillé peu à peu de toute sa déco Second Empire et il prend même feu. Et seul le méga-concert organisé par Noir Désir avec 15 autres groupes en 1997 vient lui donner l'air d'un grand projet.

Il faudra attendre l'arrivée du tram pour qu'un cinéma s'installe ici, accompagné dans la foulée par des restaurants. Le souvenir de la gare disparaît et on a peine à reconnaître une ancienne gare sous son actuelle apparence.

gare d'orléans rive droite de bordeaux Photo : F. Deval - Mairie de Bordeaux

CASERNE NIEL

Tout pour le train

Sans les trains de la gare d'Orléans, pas de magasins généraux qui s'installent juste à côté en 1865 pour stocker les marchandises. Et pas de caserne qui naît ici en 1875 pour héberger l'ultra-moderne 18ᵉ régiment du train.

À l'époque, la zone est vide ou industrielle, et ça ne coûte rien d'obtenir d'immenses terrains pour un régiment entier, et de dévier des voies ferrées pour que le régiment des trains puisse avoir... des trains dans sa cour. Elle prend de nom de Niel d'après la rue qui la jouxte et ça tombe bien puisque c'est un maréchal proche de Napoléon III.

Mais petit à petit, la pression urbaine rend ces terres intéressantes et l'armée comprend le message. Les casernes proches des villes intéressent les promoteurs, et comme partout, elle plie bagage.

La Caserne Niel sur la rive droite de bordeaux Photo : La Mémoire de Bordeaux Métropole

De la caserne à l'effervescence

Vidée de ses derniers militaires en 2005, déclassée de l'utilisation comme zone militaire en 2007, la Caserne Niel devient propriété de la Ville de Bordeaux. Et elle ne tarde pas à être le lieu de rendez-vous de tous les graffeurs de la région.

Il faut faire vite pour lui trouver une destination avant que ça ne dégénère et c'est ainsi que le projet Darwin voit le jour. Moderne, inventif, novateur, c'est un concentré de tendances qui fait de l'ex-caserne l'un des monuments les plus visités de Bordeaux

 

Caserne Niel, rive droite de Bordeaux Photo : Nicolas Duffaure

MAGASIN CONFORAMA

Le seul signe de vie

Pendant longtemps, le magasin Conforama de la Bastide fut le seul signe de vie que les Bordelais de la rive gauche percevaient de la rive droite. Jusqu'à une période récente, aux alentours du changement de siècle, on ne s'aventurait pas à passer le pont de pierre sans une bonne raison et aller faire un tour à Confo en faisait partie.

D'autant que le magasin fut longtemps le seul à ouvrir le dimanche. Le goût incertain de cette publicité en lettres énormes que l'on voyait de partout depuis les quais n'entrait qu'assez peu en ligne de compte. 

 

Conforma sur la rive droite de bordeaux Photo : La Mémoire de Bordeaux Métropole

La première disparition

Ce fut le premier signe tangible que quelque chose changeait à La Bastide. La disparition des lettrages rouges remplacés par ceux d'une banque et d'un journal (dissimulé par des arbres quand même) montra que le quartier de Queyries n'était plus. Du moins dans sa version traditionnelle de maisons ouvrières et de petites rues tranquilles.

L'urbanisme a tranché dans la longue guerre symbolique qui opposait Queyries et La Benauge, les deux quartiers de La Bastide séparés par l'avenue Thiers : le premier a disparu, l'autre a peu changé. 

Photo : Vincent Bengold

COTE DES QUATRE PAVILLONS

La voie royale

D'où que l'on vienne, c'est essentiellement par là que l'on arrivait à Bordeaux avant que la rocade ne répartisse les voitures. Et même sans voiture : la légende prétend que Roland, le « neveu » de Charlemagne, conduisit ses armées par ici en 778, avant de ne pas revenir suite à un léger incident à Roncevaux.

On descendait vers les marais et il existait dans le prolongement, disait-on, un passage où l’on pouvait traverser la Garonne à pied. Plus récemment (sur la photo d'ailleurs), cela marquait la descente depuis les bois et les vignes vers les industries fumantes de la Bastide. 

 

Photo : La Mémoire de Bordeaux Métropole

La vue royale

La côte des Quatre Pavillons a un peu perdu son statut de porte de Bordeaux, mais elle reste une entrée majestueuse qui permet d'embrasser la ville du regard avant d'y plonger.

Voitures, trams et vélos (pour les plus courageux) se partagent cette descente où la silhouette des églises, et désormais de la Cité du Vin, se détachent nettement. 

Pont Chaban Delmas vue de la rive droite de Bordeaux Photo : Steve Le Clech

USINES MOTOBLOC

La bagnole de Bordeaux

Bordeaux fut longtemps une ville d'industries et c'est sur la rive droite qu'elles ont prospéré avec le plus d'ardeur. Motobloc y fut créé en 1902 et devint rapidement une référence en termes d’automobiles. Elle exploita le premier ce qui est désormais la norme : le fameux « bloc-moteur ».

L'usine a beaucoup diversifié ses activités au fil du temps, avec un certain succès puisque 1250 personnes y travaillaient encore dans les années 50. Mais des choix stratégiques hasardeux et l'universalisation du travail à la chaîne ont eu sa peau et elle a fermé en 1961

Aujourd'hui, la place de l'usine est toujours dévolue à la voiture... mais dans son côté le moins glorieux : c'est dorénavant un immense parking presque toujours vide.

Motobloc à bordeaux rive droite Photo : La Mémoire de Bordeaux Métropole
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