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Trois auteurs, trois regards sur Bordeaux – Spécial Escale du livre
Escale du livre Bordeaux 2018 Picto info
crédit : Louise Dehaye
6 min de lecture

Trois auteurs, trois regards sur Bordeaux – Spécial Escale du livre

L’Escale du Livre, festival des créations littéraires, installe ses étales à pagivores pour une 16e édition, du 6 au 8 avril à Bordeaux. A l’occasion de ces trois jours de débats et rencontres autour des mots, nous avons demandé à trois des auteurs présents durant cet événement de nous raconter leur histoire… et leur Bordeaux.

par Anne Quimbre

publié le 26 mars 2018

modifié le 20 mai 2022

Prologue.

Du 6 au 8 avril, quartier Sainte Croix –la plus arty des « aires » de Bordeaux- l’Escale du Livre proposera un programme à destination de tous. Trois jours pour échanger avec des écrivains et des illustrateurs, profiter de lectures, performances, créations inédites, ainsi que d’un village littéraire d’éditeurs et de libraires.

Trois des auteurs présents durant cette Escale ont répondu à nos questions sur la ville, nous contant un morceau de leur histoire, et leur propre vision de Bordeaux.

Sommaire :

1)      Nikola Witko – Griott & Mungo (Flammarion Jeunesse, 2017)

2)      François Garcia – Bye bye bird (Verdier, 2018)

3)      Eduardo Berti – Inventaire d’inventions (La Contre Allée, 2017)

photo: Ivan Mathie

Chapitre 1 : Nikola Witko

Installé à Bordeaux depuis une vingtaine d'années, en provenance de Bruxelles.

Auteur (illustrateur et scénariste), je me partage en ce moment principalement entre Griott & Mungo, chez Flammarion Jeunesse, et Fluide Glacial. Avec plein d'autres projets musicaux ou graphiques en parallèle.

Bordeaux-Bruxelles : des similitudes ?

Les deux m'ont séduit pour la même raison, je crois: ce sont des villes construites en arrondissements/quartiers ayant chacun leur centre névralgique, du coup  Il y a de la vie partout, et non pas un seul centre et des km de zones résidentielles.

photo : Marco Mastroianni

Si vous deviez dessiner un quartier de Bordeaux, lequel serait-il ?

Ca serait sûrement Meriadeck, un « bubon » au milieu d'une belle cité médiévale. Incongru, comme des Légos® abandonnés par un enfant au milieu de la maquette de son père. Et qui m'évoque tellement les atmosphères de Bertrand Blier, que je lui voue une certaine affection, sans aller jusqu’à y habiter ceci dit. Un trésor pour les apprentis photographes également.

J'ai lu que vous étiez fan de rock : les caves bordelaises ont été le berceau de nombreux groupes. Y a-t-il un lieu que vous aimez particulièrement ?

Malheureusement, beaucoup d'entre eux ont fermé, et des endroits comme la Centrale, le St-Ex ou le Jimmy manquent... Cependant, on peut trouver 2 ou 3 survivants ! Le Wunderbar, le Novo local, l'Antidote... Pourvu qu'ils résistent !

C'est vrai que ces caves sont une partie de l'âme de la ville.

photo : Vincent Rochefort / credit : Haaghun-Photographie

Un quartier Bordelais qui vous inspire, qui invite à l’écriture ?

La place Saint Michel avant sa transformation, sans hésitation. Et maintenant, plutôt les Capucins. Un des quartiers les plus populaires et authentiques, avec des trognes qui racontent une histoire, des morceaux de vie, parfois sales, mais réels. Et son marché, véritable brassage de populations dont je ne me lasse pas.

Si vous pouviez glisser un petit mot au Bordeaux de « dans 50 ans », que lui écririez-vous ?

De faire bien attention à garder sa personnalité. A trop se maquiller, on ressemble à tout le monde. Et je la remercierais pour les années, les rencontres, et toutes les choses qu'elle m'aura données.

photo : picsol

Chapitre 2 : François Garcia

Je suis né en 51. J’ai été médecin à Bordeaux pendant près de 40 ans, dont 20 ans dans le quartier des Capucins. Mes arrières grands-parents se sont installés à Bordeaux au XIXe siècle, nous avons toujours gardé un lien avec l’Espagne du côté de mon père.

J’ai mené de front mes deux activités littéraires et médicales, et depuis ma retraite (il y a un an), je me consacre à 100% à cette seconde activité, notamment la sortie du livre que je présente à l’Escale, Bye bye bird. Ce livre retrace le parcours de Paco et ses camarades, en séjours linguistiques à Bristol dans les années 60, et leur apprentissage d’un monde nouveau, entre rock et liberté sexuelle. Je ne savais d’ailleurs pas que nous fêtions justement cette année les 70 ans du jumelage Bordeaux/Bristol, il y a beaucoup de similitudes culturelles et sociales entre ces deux villes, des villes « de port ».

photo : Frédéric Desmesure

Votre premier roman, « Jour de Marché », évoquait les liens entre Bordeaux et l’immigration hispanique. C’est le Bordeaux que vous avez connu ?

Bordeaux est toujours présente dans mes livres. Au premier plan comme aux confins.

Mon premier livre parle en effet d’un Bordeaux populaire, loin de l’image guindée que l’on en donne ; où le sud plonge ses racines à travers plusieurs courants d’immigrations. Chacun venait au marché ou sur le port pour chercher du travail, il y avait un vrai brassage des langues.

C’est en effet le Bordeaux de mon enfance, celui des Capucins.

photo : Pierre Planchenault

Quelles différences, des années plus tard ?

L’ouverture ! J’ai grandi dans une ville aux murs gris, au port fermé sur un univers pas dénué de poésie, mais dos au fleuve.

Parfois je repense à cet univers populaire disparu, des Capus aux Bassins à Flot, le bal des grues, chalutiers et marchandises, la sensation de couvre-feu le soir.

Mais le costume étriqué se déchire peu à peu, à grands coups de projets culturels. La ville s’ouvre, et c’est tant mieux. Une vraie culture rock et artistique s’est développée en même temps que les façades ont retrouvé de la lumière.

 

photo : Vincent Rochefort / credit : Haaghun-Photographie

Un quartier qui invite à l’écriture ?

J’écris toujours dans les cafés du centre-ville, tôt le matin. J’y trouve à la fois un repli nécessaire et une convivialité rassurante. J’aime les dimanches matins calmes du centre de Bordeaux, le monumental des Quinconces et du Grand Théâtre, avant que la foule ne se forme. Ce sont des moments qui m’inspirent.

Un auteur qui collerait bien à la peau de Bordeaux ?

Evidemment, Montaigne pour son universalisme qui colle bien à Bordeaux, et Mauriac qui en a dépeint la société avec minutie, mais il ne faut pas se cantonner à confier uniquement la culture littéraire bordelaise à ces mêmes auteurs.

Les temps changent, il y a beaucoup de gens qui écrivent à Bordeaux. Il faut que vive la langue, que la vie de la ville passe à travers les témoignages littéraires, c’est important de les encourager, pour enrichir l’héritage culturel de la ville, en rappelant bien qu’il n’appartient à personne.

Un monument de Bordeaux qui vous touche ?

Le stade Chaban-Delmas, que nous appelions « stade municipal » dans mon enfance. Il était un lieu de rassemblement sportif, mais pas que. Je ne voudrais pas le voir mourir…

photo : Steve Le Clech

Chapitre 3 : Eduardo Berti

Je suis écrivain. Auteur de romans et de nouvelles. Dans mes livres j’aime explorer les frontières, toujours imprévisibles, entre l’habituel et l’exceptionnel, entre la réalité et la fantaisie. Mais j’aime surtout changer d’univers d’un livre à l’autre. Cela correspond à mon esprit nomade.

J’ai vécu à Buenos Aires (ma ville natale, en Argentine), puis un temps à Paris, un autre temps à Madrid… Et me voilà ici, à Bordeaux, depuis presque cinq ans.

J’ai écrit la plupart de mes livres en espagnol. Ils sont traduits par Jean-Marie Saint-Lu, devenu un grand ami. Mais depuis quelque temps, je commence à écrire aussi en français. Mon dernier livre publié en France, Inventaire d’inventions (inventées) - éditions de La Contre-Allée, est une sorte de catalogue d’objets qui n’existent que dans la fiction : la machine à arrêter le temps, les boucles d'oreilles-réveil, le traducteur chien-humain, le livre infini, l'effaceur de mémoire, etc.

photo : Dorothee-Billard

Y a-t-il des similitudes entre Bordeaux et l’Argentine ?

La bonne viande, le goût pour le vin et le soleil, la proximité de l’océan Atlantique….

Une grosse partie de l’Argentine, c’est la pampa ; notre plaine à perte de vue, devant laquelle un écrivain français déclara, il y a presque un siècle, qu’elle suscitait un "vertige horizontal". J’ai grandi dans une ville-plaine (Buenos Aires) et cela fut l’une des premières choses qui m’a sauté aux yeux à Bordeaux. C’est une ville idéale pour faire du vélo, car très peu accidentée.

En même temps, Bordeaux me fait aussi beaucoup penser à Montevideo, la capitale de l`Uruguay. Une ville plus humaine, moins « stressée ». Je suis tombé sous le charme de Bordeaux assez rapidement : ce n’est pas un hasard si elle a quelque chose de Montevideo, une des villes que j’aime le plus au monde.

photo : Sophie Dubosc

Y a-t-il un personnage bordelais qui vous marque particulièrement ?

Michel de Montaigne ! Et plus récemment, j’aime beaucoup l’univers de Sempé, qui est né à Pessac.

Y a-t-il un quartier bordelais qui vous inspire plus que les autres ?

J’aime beaucoup marcher, flâner, et me perdre dans les quartiers de la ville. Il y a des jours où je m’installe pour lire (ou écrire) au bord de la Garonne. Quand il fait beau, j’opte pour les parcs. Par exemple, le Jardin Public et la terrasse de son café. En balade, vous me croiserez aussi à Nansouty, aux Chartrons ou encore à Caudéran, mais j’ai un faible pour le quartier de Saint-Bruno, avec ses formidables échoppes.

photo : Steve Le Clech

Si vous pouviez glisser un petit mot au Bordeaux de « dans 50 ans », que lui écririez-vous ?

Je lui parlerais de mon fils et de mon père.

Mon père, pour lui raconter que j’ai choisi de m’installer à Bordeaux. Sans savoir que lui (né en Roumanie et installé en Argentine quand il avait un peu plus de 20 ans), quand il avait fait son grand voyage à travers l’océan, avait pris un bateau bordelais.

Mon fils, pour lui demander comment tout s’est finalement passé entre Bordeaux et lui. Quand on fait le choix d’une ville, on lui demande des choses et on lui en donne d’autres en échange. Quand ma femme et moi avons pris la décision de vivre ici, nous avons confié à Bordeaux ce que nous avons de plus précieux : notre fils. Pour l’instant, tout se passe très bien entre Bordeaux et lui, et je crois que nous avons fait un bon choix… Mais quand même, je voudrais bien me retrouver à 50 ans d’ici, afin de confirmer cette intuition.

 

photo : Sara Soulignac

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